Hélène ARTAUD (janvier 2015)
REGARDS sur une Convention : YOGANUSASANAM *, avec Geeta Iyengar
Pune, décembre 2014
1200 participants, 57 nationalités représentées du 1er au 10 décembre 2014, pour 10 jours de formation à Pune avec Geeta Iyengar à l’occasion de son 70° anniversaire.
Approche générale
Emotion, générosité et transmission
Geeta a tout de suite présenté cet événement à Pune comme un hommage à son père, B.K.S.Iyengar, décédé cet été et qui avait lui-même beaucoup insisté pour que cet événement ait lieu à l’occasion de ses 70 ans. Elle évoque souvent sa présence invisible au milieu de nous, matérialisée par les grandes photos verticales en noir et blanc de Guruji en Tadasana de chaque côté de la salle, qui encadrent la pratique comme les colonnes d’un temple. Avec beaucoup d’émotion, elle confie combien elle se sent seule aujourd’hui sans lui à ses côtés et combien il lui manque, à elle et à nous tous dans le monde entier. Elle dit qu’aujourd’hui chaque fois qu’elle se sent traversée par le doute, elle se pose la question « Qu’aurait fait Guruji dans ce cas ? Qu’aurait-il dit ? » et que cela l’inspire beaucoup pour trouver des solutions adaptées.
Geeta précise souvent qu’elle souhaite dans son enseignement transmettre le maximum de ce que son père lui a appris directement pendant toute sa vie, ou qu’il a transmis avec passion et exigence pendant de longues années aux enseignants présents autour d’elle pour l’animation de la Convention. Elle réaffirme son objectif permanent d’assurer la continuité de l’enseignement du yoga Iyengar pour les générations suivantes de la façon la plus juste possible.
* YOGANUSASANAM
Yoga signifie le Yoga, à la fois en tant que moyen et résultat.
Anusasanam peut être traduit par les instructions, la discipline ou l’enseignement.
En attendant l’entrée de Geeta
Accueil des débutants, ajustements dans les postures de base, exigence et corrections
Geeta explique que c’est pour cela qu’elle a souhaité que toutes les personnes ayant au moins trois ans de pratique puissent participer, donc des personnes relativement débutantes. Dans son enseignement, elle apporte beaucoup de précisions ; elle est très exigeante sur les ajustements de base, dans des postures simples, car selon elle, si les enseignants et les pratiquants « se jettent » trop vite et sans conscience dans les postures, sans être vigilants sur les alignements et sur les directions, c’est tout l’enseignement de Guruji qui pourrait ne plus être respecté avec le temps et qui perdrait progressivement sa richesse et sa puissance.
Elle attire notre attention sur notre responsabilité à tous et en particulier pour les enseignants, afin de garder cette passion, cette discipline et cette attention pour transmettre son enseignement dans sa précision, sa richesse et son intégrité.
Plus d'information sur la méthode Iyengar.
Elle insiste particulièrement aussi sur l’importance pour un enseignant de corriger les élèves, s’il voit que leur pratique n’est pas juste, même si cela ralentit apparemment le cours. C’est aussi l’héritage de Guruji, qui jusqu’à la fin de sa vie souhaitait corriger les élèves, afin que la pratique ne prenne pas de mauvaises habitudes, ce qui entraînerait de mauvaises conséquences pour eux et pour la transmission du yoga. “If I don't correct, experience will go wrong, the practice will go wrong”.
Le pranayama est essentiel et après trois ans environ de pratique exclusive des asanas, doit être remis au coeur de notre pratique de yoga.
Tous les cours de Geeta pendant ces 10 jours ont été orientés sur la préparation au pranayama et le pranayama lui-même.
Les asanas, et en particulier les postures debout, préparent le pranayama.
Dès le premier jour, elle explique pourquoi le pranayama ne peut être fait tout de suite par des débutants et pourquoi ils doivent commencer par les asanas. D'ailleurs le pranayama ne sera intégré dans les cours de Geeta qu'à partir du jour 4.
1) Pour faire du pranayama, le corps et l'esprit doivent être légers (« sharp and quick »). On doit s'entraîner à sauter dans les postures, à pratiquer et à s'ajuster rapidement dans les asanas, avant de faire le pranayama. L'énergie qui existe en nous nous donne la vie, on doit la réveiller et la stimuler par les asanas.
2) Dans la vie courante, on ne sait pas rester tranquille, on bouge tout le temps, on ressent tout le temps des émotions. Il nous faut acquérir la stabilité et la tranquillité émotionnelle avant de pratiquer le pranayama. Les asanas et en particulier les postures debout nous donnent la stabilité physique (après 3 ans de pratique en moyenne) et nous amènent vers la tranquillité. Il ne faut jamais oublier de faire savasana après les asanas car c'est le savasana après les asanas qui amène la tranquillité émotionnelle.
Si on s'assied comme un débutant dans le pranayama, sans aucun bagage spirituel et plus simplement, sans idée ou expérience de ce qu'est la tranquillité intérieure, si on s'assied sans savoir ce que l'on cherche, cela ne viendra pas à nous. "Quand nous sommes dans le noir, il faut beaucoup de force intérieure pour trouver la lumière". Les asanas nous donnent cette expérience de la stabilité et de la tranquillité qui nous éclaire et nous donne la direction pour aller ensuite plus facilement dans le pranayama. On a déjà l’intuition de ce que l’on cherche, l’élan aussi, la curiosité, l’envie.
3) Si les systèmes internes ne sont pas tranquilles (système digestif, système nerveux par exemple) le pranayama n'est pas possible. Les asanas, par leurs effets physiologiques et thérapeutiques, permettent de tranquilliser ces systèmes. La posture idéale pour commencer le pranayama est, pour la même raison, une posture allongée en savasana. Il est important de s'assurer de cette tranquillité des organes et des systèmes internes avant de faire le pranayama assis.
4) Les postures debout font le coeur léger, permettent de sentir le corps, permettent de prendre conscience de nos différents souffles. Si on s'assied quand on est débutant, on peut difficilement sentir le souffle, les différentes respirations, ça vient avec la maturité.
Quand on fait les postures debout, le corps est très près de notre perception, on le voit, on le sent mieux, le sang circule plus vite, on sent bien notre respiration. "Les postures debout nous aident à sentir d'où vient le pranayama".
Changer notre regard sur le pranayama : bousculer les idées reçues
Geeta a plusieurs fois remis en cause certaines idées reçues sur le pranayama :
Faire du pranayama ce n'est pas (seulement) s'assoir et rester tranquille.
Faire du pranayama ce n'est pas (seulement) enchaîner des exercices de respiration.
« Ce n'est pas une technique, cinq minutes de viloma, cinq minutes de ujjayi, 5 minutes de digital, etc...et hop j'ai fait mon pranayama ! »
Etre patient, pratiquer régulièrement le pranayama de façon plus simple et plus libre et accepter d’apprendre.
Connecter les asanas et le pranayama.
1) Le pranayama est un sujet qui ne peut pas être connu objectivement (par exemple par l'étude, des livres, etc...) même si elle nous rappelle qu'il est essentiel pour nous, et surtout pour les profs, de lire "Lumière sur le pranayama" (« Y passons-nous autant de temps que sur "Lumière sur le yoga? »). Le pranayama est une expérience intérieure personnelle qui se ressent et qui ne se développe qu'avec la pratique. Il faut pratiquer pour sentir et pour progresser. La pratique est la seule voie d'accès et de compréhension du pranayama.
Elle regrette qu'il soit aussi négligé "Si j'avais annoncé une convention sur le pranayama vous seriez 10 fois moins nombreux devant moi aujourd'hui".
2) Le pranayama s'apprend progressivement. “You can't rush into it”.
D'ailleurs tout s'apprend (blague de Geeta : « même pour se brosser les dents, un enfant a besoin de l'apprendre plusieurs fois ! »). Pour le pranayama, beaucoup plus que pour les postures, on est impatient, on voudrait tout savoir, tout sentir, tout de suite. Être patient, pratiquer régulièrement et accepter d'apprendre. C'est encore plus vrai pour les profs : ce n'est pas parce qu’on fait du pranayama 15 minutes toutes les semaines, qu'on peut prétendre l'enseigner. On doit accepter de travailler pour élever son niveau. Il faut prendre son temps, c'est un long processus intérieur.
3) Il faut mettre ou remettre le pranayama au centre de notre pratique du yoga, de façon beaucoup plus libre, surtout si on est un enseignant ou un pratiquant avancé.
On peut le faire avec des séances spécifiques de pranayama. Mais surtout on doit se sentir plus libre, et faire des séances de pranayama après la pratique et aussi avant la pratique. C'est d'ailleurs ce que nous avons fait pendant cette convention, 3 fois après la pratique, 3 fois avant la pratique. On doit décloisonner le pranayama pour pouvoir en faire plus, de façon moins formelle et surtout de façon plus unifiée avec les asanas.
L'empreinte des asanas nourrira le pranayama s'il est fait après, l'empreinte du pranayama nourrira les asanas s'il est fait avant.
4) Commencer et continuer par des choses simples.
Respirer calmement, profondément, prendre conscience du souffle et de toutes les ouvertures dans le corps liées au souffle. Ouvrir la poitrine largement dans toutes les directions à l’inspiration, et la garder ouverte à l’expiration, en expirant vers le bassin, dans le ventre, en position couchée puis en position assise.
Pratiquer le Jalandhara Bandha et le Brahmari pour nettoyer la gorge et l’esprit.
Travailler les yeux ouverts puis les yeux fermés, discipliner les yeux pour discipliner l’esprit.
Ce n’est pas la peine d’enchaîner des exercices techniques de plus en plus compliqués. Rester simple, rester attentif, de plus en plus réceptif, sensible et surtout se discipliner pour être régulier dans sa pratique.
5) Connecter les asanas et le pranayama.
Dans les asanas eux-mêmes, le souffle doit toujours être présent et on doit en être de plus en plus conscient. Se connecter de plus en plus avec le prana dans les asanas. Ce n'est pas réservé au pranayama. Le pranayama et la conscience du souffle dans les postures permettent de décentraliser le corps (trop souvent nous plaçons le centre du corps dans le cerveau). Le souffle permet de faire descendre l'intelligence de la tête vers la poitrine, vers le coeur, mais progressivement aussi dans tout le corps.
"Decentralize the brain, descend the brain down to the body."
(Tous ces éléments ont été repris de mémoire, avec mon interprétation, à partir de la présentation de Geeta du premier jour et aussi à partir d’autres explications complémentaires que j’ai pu recueillir en cours de formation).
Voici ci-dessous le résumé de ce que j’ai compris et structuré sous forme d’analyse un peu personnelle suite à ces discours qui me sont restés quand même partiellement confus (Toute la convention a été filmée, les DVD seront prochainement disponibles… pour trouver la pleine lumière !)
Le pranayama est indispensable à la pratique du yoga : c'est lui qui assure notre équilibre émotionnel.
Le pranayama n'est pas indépendant de la pratique des asanas, les asanas sont au service du pranayama, comme le pranayama est au service des asanas.
Les asanas sont au service du pranayama :
1- Ils renforcent le corps pour lui permettre de se tenir droit et sans douleur pour pratiquer les exercices en position assise.
2- Ils rendent le corps et l'esprit alertes et légers.
3- Ils pacifient les organes internes.
4- Ils donnent le goût de la tranquillité.
5- Ils montrent le chemin de la pratique et de la patience pour intégrer les apprentissages.
Le pranayama est au service des asanas :
1- Il nous apprend à respirer profondément et à faire circuler l'énergie dans tout le corps depuis les pieds jusqu'à la tête, ce qui doit se faire aussi dans les asanas.
La circulation du prana dans les asanas éveille tout le corps. Par exemple, Geeta dit que quand les jambes sont faibles dans une posture, c'est que le prana n'y circule pas.
Le pranayama se pratique en position assise et couchée d'abord. Puis les ouvertures du pranayama et la circulation du souffle se mettent aussi en place dans les postures.
Dans les asanas, dans un premier temps, on s'installe dans la posture, mais ensuite avec une respiration ample et bien orientée, la posture s'installe en nous. Et le prana circule dans tout le corps. Et comme le dit Geeta, « la posture se reflète dans tout notre corps ».
2- Le pranayama développe la sensibilité de tout le corps.
Les asanas développent principalement la sensibilité des organes d'action : les bras, les jambes (face interne, externe, avant, arrière), les aines, les cuisses, les genoux, les mollets, les chevilles, les pieds, les orteils, etc.... (« Tout un monde dans une seule jambe ! »), et leurs articulations dans le buste (bassin, épaules). C'est d'ailleurs la circulation du prana dans l'asana, du souffle, de la conscience, qui permet cette sensibilité, sinon la zone est inerte ou juste douloureuse, sans finesse de ressenti.
Le travail de pranayama en lui-même développe la sensibilité de certaines zones qui sont plus difficiles à sentir dans les asanas sans une grande maturité, comme la sensibilité interne de la poitrine, du ventre, de la gorge et de la tête, la sensibilité des organes et des voies respiratoires au sens large. Par exemple, le pranayama développe la sensibilité du nez, on peut sentir le plafond du nez, le plancher, le centre du nez, les bords du nez, le bout du nez.... (« Tout un monde aussi dans un seul nez ! »)
Ultimement, le pranayama nous met en lien avec le Divin et nous permet de réaliser l’union entre l’âme individuelle et l’Âme universelle.
Dans le yoga, c'est Geeta qui le dit, nous voulons être "asanasta", établis dans l'asana, posés, installés et "pranasta", établis dans le prana, le souffle, l'énergie qui nourrit, là aussi, posés, installés.
Si comme le dit Geeta, et comme le dit la tradition du yoga, nous considérons que le prana est d'origine divine, par les prières, les invocations, nous nous absorbons dans le regard de la Divinité, et par le pranayama, nous laissons la Divinité s'absorber en nous.
Le pranayama permet ultimement de réaliser l'union de l'âme individuelle et de l'Âme universelle, c’est le chemin du yoga.
Pour cela, il n'y a pas de recettes, de technique. Geeta dit qu'il ne faut pas se poser de questions trop compliquées, qui ne correspondent pas à notre niveau de pratique, de conscience et de maturité, qu'il faut simplement être honnête dans ce que l’on fait, étudier avec persévérance, foi et patience, et surtout pratiquer.
La conférence du jour 6 sur le thème : "How to get the universal conscience in ?" m'a donné un nouvel éclairage sur la pratique du yoga et du pranayama et sur ce processus d'union entre l'âme, la conscience individuelle et la Conscience universelle.
Voici un petit résumé, selon ma compréhension de cette conférence :
Birjoo est parti de la question : « Qu'est ce qui nous donne envie de faire et de refaire du yoga? »
C'est que la Divinité, qu'on peut aussi appeler la Conscience, est entrée en nous et que nous avons envie de la retrouver plus souvent, plus profondément et plus longtemps. C’est ce phénomène qui explique l’attraction du yoga. Mais nous ne reconnaissons pas toujours cette Divinité. En effet, pour la reconnaître, il faut deux choses :
- d'abord avoir la sensibilité pour la percevoir
- et ensuite avoir un concept pour pouvoir mettre des mots dessus, pouvoir le dire.
Quand on absorbe les omoplates fermement, quand on inspire, au niveau du ressenti, on sent que quelque chose s'ouvre, sort, c'est la conscience individuelle qui sort de notre corps avec l'inspiration et reste ensuite dehors.
Quand on expire, même si objectivement, de l'air sort de notre corps, au niveau du ressenti, on a l'impression que quelque chose rentre, c'est la conscience universelle qui rentre.
Inspiration : la conscience individuelle sort. Expiration : la conscience universelle rentre. Ne pas se préoccuper du mouvement objectif de l’air, mais être dans le ressenti.
C'est aussi pourquoi dans le pranayama, après l'inspiration, Geeta ne dit pas de « retenir » le souffle, afin de ne pas bloquer ce processus de « sortie de la conscience individuelle », elle dit de garder la poitrine ouverte : "Keep the chest open, don't lose the openess of the chest".
Les idées phares de la pratique
Ouvrir la poitrine, c’est ouvrir le cœur, et c’est l’essentiel.
Pacifier le ventre et l’esprit.
Pour préparer le pranayama, ouvrir la poitrine. Pour ouvrir la poitrine, ouvrir les aisselles, absorber les omoplates et rentrer les dorsales.
Pour pacifier les organes du ventre, expirer dans le ventre, élargir le dos et tout l’arrière du corps comme une jeune feuille de bananier.
Développer l’attention sans habitudes, l’exigence sans dureté, la discipline sans violence.
Geeta se fâche contre les profs qui vont trop vite en sirsasana par exemple, contre le trop d'habitudes. « Ce qu'on fait chaque jour dans le yoga est différent de ce qu'on a fait avant. Etre à chaque fois pleinement conscient, cultiver l'observation, casser les habitudes. Ne pas faire les postures d'aujourd'hui avec les postures du passé. Toutes les corrections doivent être le résultat de l'intuition d'aujourd'hui, par un esprit alerte, pas une action reproduite de mémoire. »
Un débutant doit faire l'action, un pratiquant plus avancé doit observer l'action. « Pour avoir accès à l'infini, il faut être dans une ouverture complète, donc déjà commencer par être ouvert aux nouvelles approches des postures ! Plus on avance dans le yoga, moins on doit avoir d'habitudes, plus on développe la conscience. Aller du connu vers l'inconnu. C'est comme quand on monte dans un avion, on fait totalement confiance au personnel navigant. Quand un enseignant vous emmène, c'est comme un voyage, on ne choisit pas, on accepte complètement. The known has limits. Go beyong limits. »
Cultiver la légèreté du corps, l’esprit calme et alerte, et la conscience à chaque instant.
« Le yoga nous permet d'avancer patiemment sur un chemin qui nous amène progressivement de l'extérieur vers l'intérieur, de la peau vers l'âme, en commençant par les organes d'action, en traversant les organes de perception, vers l'esprit, vers l'âme.
On peut commencer ce chemin à tout âge, mais surtout à tout moment dans sa vie, dans sa journée, et pas seulement sur le tapis, on peut s'installer dans cet état de yoga, être présent et actif vers l'extérieur, se tourner vers les plaisirs extérieurs mais savoir aussi faire une pause et se tourner vers l'intérieur.
Se poser, revenir vers soi et s'installer dans un état de yoga, c'est choisir de se tourner vers l'intérieur, par la conscience, par le souffle, par l'écoute, aller vers l'intériorisation, l'intériorité. Et ultimement la tranquillité. »
Chacun est responsable de sa pratique et des ajustements de sa pratique par rapport à son corps.
« Ne pas pratiquer avec dureté, avec raideur, en force (en particulier les français !). C'est un excès de volonté, ce n'est pas le yoga qu'a enseigné BKS Iyengar. Retenir les ajustements, les façons d'entrer dans les postures. Si on tremble dans les postures, ça peut être dû aux muscles, à la raideur et dans ce cas ce n'est pas grave, mais si c'est dû à une faiblesse du système nerveux, c'est que l'on a besoin de support, d'une autre façon d'entrer dans les postures ou de plus de postures allongées. C'est que la pratique est trop dure. »
On parle beaucoup de yoga thérapie. Mais le yoga doit être d'abord préventif.
La non-violence dans la pratique est essentielle. Chacun pratique en fonction de lui-même. Le yoga contribue à éviter les souffrances qui ne sont pas encore arrivées. Surtout ne pas s'en créer avec le yoga.
Nous devons nous ajuster nous-même : c'est notre devoir. "It's my duty to adjust. It's my self realization". Je suis responsable de mon ajustement. Je ne dois pas lutter ni tenir avec une posture incorrecte. En m'ajustant, même si ce n'est pas parfait, c'est correct. Les ajustements ne se feront pas sans l'esprit, sans l'intelligence. Je dois mobiliser mon intelligence pour observer et m'ajuster. Si la posture est incorrecte, cela crée des habitudes incorrectes et cela aura à terme des répercussions négatives sur moi.
Développer une attitude intérieure d’ouverture totale pour s’absorber dans les asanas.
Privilégier les enchaînements dynamiques pour enlever les peurs. "Nous avons tellement peur que nous n'osons pas aller vers tout ce que nous savons faire. Le yoga est là aussi pour briser la raideur de nos esprits. "
Cultiver la prière et la dévotion aux maîtres de yoga, à la Divinité, à M. Iyengar et à Patanjali
Geeta explique pourquoi elle interrompt beaucoup la pratique pour corriger. BKS faisait comme ça, s'il voyait quelque chose d'incorrect, il arrêtait tout le cours. A 10 jours de sa mort, assis dans son jardin, il donnait encore des instructions à ses assistants pour qu'ils aillent corriger les pratiquants qu'il voyait par la fenêtre au premier étage de l'Institut. Corriger les élèves, c'est lui être fidèle.
Il est important pour tous les enseignants d'être extrêmement vigilants sur l'ajustement de tous les principes de base de chaque posture, ce n'est qu'à cette condition que le yoga Iyengar pourra être transmis dans le respect de l'enseignement de son maître, sinon, il se perdra. Geeta reviendra presque tous les jours sur les exigences liées à la transmission juste et complète des enseignements de Guruji, transmission qui est au coeur de ses préoccupations aujourd'hui.
L'équipe de professeurs ayant assisté Geeta dans cette Convention Abhijata Iyengar
Cette convention est accessible à tous dès trois ans de pratique.
Geeta insiste sur la nécessité de donner de bonnes bases aux nouvelles générations qui ne connaîtront pas Guruji pour que toute la richesse de son enseignement ne soit pas diminuée ou dévoyée par manque de rigueur. Pour les pratiquants plus avancés, qui ont l'impression de connaître les postures, « réapprenez les ajustements de base, c'est votre trésor que BKS vous a transmis grâce à son travail, et à sa pratique et méfiez-vous des habitudes. Rester toujours conscient pour observer le moment où l'on est repris par ses habitudes, dans son corps ou dans son esprit redevenez conscient et alerte à l'instant présent. Il y a beaucoup à faire, et c'est même infini, pour rester présent dans chaque posture, car dans chaque posture chaque partie du corps a plusieurs directions: avant, arrière, haut, bas, intérieur, extérieur. Restez présent dans chaque posture dans chaque partie du corps dans toutes les directions.
Rappelez-vous que la santé ce n'est pas seulement l'absence de douleurs, c'est aussi une conscience totale du corps dans sa totalité. Sinon à terme, les parties négligées risquent de se manifester sous forme de douleurs ou de maladies. »
Les grandes photos de Guruji seront mises en vente aux enchères au profit des projets de Bellur.
Jour 7 "Surprise aujourd'hui !" nous annonce Geeta.
Dès notre arrivée, tout semble déjà différent. Un bruit court dans les couloirs : "No props, no bags, mat only".
Comme c'est dur de se séparer de toutes nos choses ; chacun essaie de tricher un peu, une couverture par-là, un sac à dos par-ci, mais les rappels au micro sont nombreux, de plus en plus impatients, de plus en plus autoritaires, et finalement tout rentre au vestiaire, bon gré, mal gré. La grande salle brusquement sans relief nous apparaît immense, une mer étale magnifique de tapis juxtaposés, bleus, verts, violets, gris, sans aucune vague, accueillante et calme. Retour à la simplicité, sensation de légèreté.
La surprise, ce sont les enfants. Des classes de yoga de Bombai et de Pune. 170 enfants de 6 à 16 ans qui n'en finissent pas d'arriver en courant par une porte latérale sous les applaudissements internationaux de toutes les personnes debout dans la salle absolument ravies.
C'est Geeta qui guide la classe et les professeurs habituels des enfants qui font les démonstrations sur l'estrade. On voit bien les enfants sur grand écran et certains d'entre eux font les clowns en se disant bonjour face à la caméra. Ça fait du bien de voir que le yoga ne change pas les enfants !
Tous se reconcentrent assez vite car la pratique commence. Chacun sur son tapis est incité dans la mesure de ses possibilités à suivre le même cours que les enfants.
Beaucoup d'énergie, de fluidité, de joie. Beaucoup d'images aussi dans les mots : « look at the ceiling ! Be tall ! Regardez comme le plafond est haut. Levez la tête ! Étirez les bras vers le haut comme si vous vouliez toucher le plafond ! Ouvrez les bras sur les côtés et montez les vers le ciel comme des ailes vers le haut ! Soyez des oiseaux et au-dessus de votre tête, tapez dans vos mains ! »
Puis on s'étire, on se baisse, on saute, on ressaute, on va en avant, en arrière, et Geeta qui rit. Qui donne des défis, qui leur dit qu'ils font bien mieux que les adultes. Et tout le monde rigole, car c'est vrai en plus parfois.
…Chaturanga dandasana… Se mettre sur le ventre si on n'y arrive pas. Elle montre que la plupart des enfants jeunes n'ont pas la force pour y arriver mais qu'ils ont l'intelligence pour se mettre à plat ventre et repartir à partir de là, sans se poser de questions, sans se juger ou se dévaloriser et surtout sans se faire mal. Elle invite chacun d'entre nous à retrouver son âme d'enfant dans l'enchaînement des postures et dans la façon de les faire, sans perfectionnisme et sans dureté, avec légèreté, sécurité et dans la joie. Elle se fâche aussi contre les personnes indisposées qui suivent la pratique pour enfants alors qu'elles devraient faire leur programme, elle insiste sur la priorité qui est de se respecter, de s'adapter à son état, et ne pas vouloir toujours faire plus de choses, simplement parce ce qu'on en a envie, ou que quelqu'un à côté de vous le fait.
Et puis on chante des prières, assis, debout, les mains jointes sur un rythme enlevé. C'est plein de joie cette pratique, c'est formidable, Geeta rayonne vraiment et elle est belle à voir dans sa générosité et sa tendresse.
J’ai aussi assisté à un cours pour enfants, le dimanche matin à l’Institut.
Balewadi Stadium, Badmington Hall à Pune
Le code couleur, l’image du jour sur grand écran avec le plan de la salle, pour se positionner par rapport à l’estrade chaque jour différemment et simplement. Les français étaient en jaune. Le 7 décembre, nous étions complètement à gauche de l’estrade. Chaque jour nous changions de place. Nous avions un vestiaire, jaune lui aussi, pour nos matériels, et un badge jaune qui ne nous quittait jamais. Superbe organisation, très fluide, et beaucoup d’assistance en cas de problèmes. Bravo à toute l’équipe pour l'organisation.
Prashant Iyengar est venu saluer sa sœur à la fin de la convention. Ça aussi c’était une superbe surprise.
Le dernier repas a été offert par la famille Iyengar à tous les participants. Un petit miracle d’organisation (assez bruyant !). Nous nous sommes régalés avec les thalis.
Parce que l’Inde ce n’est pas tout à fait que le yoga quand-même ! Quelques autres images de mon voyage.
Après-midi aux grottes de Karla, un petit air de campagne
Offrandes et grottes bouddhiques
Shopping et promenades à Pune
Motos et rickshaws pour se déplacer en ville, à toute vitesse …et en zig-zag ! Grouillante, colorée et bruyante intensité urbaine, klaxons toujours.
Derniers jours dans le beau centre de santé ayurvédique de Kare, dans les montagnes au calme au-dessus d’un lac.
Yoga, massages et régime santé !
Tout s’est bien passé. C’était formidable. Merci !
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